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Cachez moi ce vert que je ne saurais plus voir

A n’en pas douter, jour le plus chiant de la semaine, le dimanche est toujours l’occasion de déambuler sans buts sur le net et de se perdre au hasard d’un site, d’un blog; au hasard d’urbanews par exemple. Hier  journée de honte et de Michel Drucker, je me suis donc arrêté de vivre et j’ai cliqué. A force d’errance, perdu entre deux vidéos de lolcat, j’ai fini par rencontrer quelque chose… C’est vert d’abord, trop vert même. Mais bientôt ce qui se fondait dans les reflets de l’herbe grasse paraît se détacher : des avions,  comme autant de moutons blancs pâturant dans les prés…  Bref, une évocation, celle d’un bocage -accessoirement futur aéroport nantais-, qui n’a pas manqué de m’interpeller et d’occuper mon esprit pour un temps à la critique d’un marketing urbain, pas toujours très louable.

Le « greenwashing : plus vert que vert.

Le mot est un peu barbare pourtant il traduit une réalité récente du monde de la publicité et plus généralement du marketing. L’éco-blanchiment -à préférer au « greenwashing » pour les défenseurs de l’exception culturelle française-, terme tout droit issu des « thinktank » spécialistes de l’analyse des stratégies marketing, est l’un des derniers outils salvateurs des compagnies pas très cleans. L’opération d’un éco-blanchiment est simple : Prenez une entreprise, si possible un peu crade, sinon un bien de consommation dont le « capital écolo » ne semble plus à la hauteur des discours de Dominique Voynet, puis passez-le au vert. Ajoutez-y un petit slogan du type « Conçu et développé au pays des accords de Kyoto »… Vous remarquez ? Ca sent déjà meilleur.

Pour les tenants de cette méthode et les as du « marketing durable », l’objectif est double et les gains qui l’accompagnent également. Si dans un premier temps une telle stratégie a le mérite de servir l’image de l’entreprise auprès de l’opinion publique notamment, elle ne manque pas de soulager également les consommateurs et d’orienter leur adhésion. Après tout, si c’est vert, je fonce !

Le marketing vert à l’épreuve des projets de territoire.

« La couleur a ses vertus pourtant, si l’on s’évertue à faire du vert un objet de trop de vertus, on le tue ! », aurait pu s’exclamer Raymond Devos tout essoufflé, dans un de ses sketchs.  Et c’est vrai qu’il n’y a qu’à se pencher quelques secondes sur le projet paysager du futur aéroport nantais pour comprendre que l’abus de lessive verte a tendance à falsifier, lorsqu’il ne détruit pas tout simplement la réalité de certains desseins de territoires. Pour Vinci qui aura à charge la réalisation de l’infrastructure d’ici à 2015, date prévue de sa livraison, l’image est un enjeu de taille et valait bien au moins, l’intervention éclairée de l’architecte Jacques Ferrier et du paysagiste Bernard Lassus.

Illustration du futur aéroport nantais de Notre-Dame-des-Landes (Source Vinci)

Le greenwashing ne se limite plus aujourd’hui à la publicité classique et s’invite de plus en plus au cœur des projets d’urbanisme. Plus la réalisation est exposée à débat, plus elle est soumise au regard critique de la collectivité, plus elle aura tendance désormais à jouer, et ce de manière abusive, la carte du marketing vert. Une manière effectivement, dans le cas nantais, de faire oublier ce que pourrait coûter à l’environnement le bilan carbone de la construction  et surtout du fonctionnement d’un tel équipement. Un aéroport qui devrait accueillir, dés la première année de mise en service, pas moins de 3 millions de passagers.

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L'auteur
Josselin Thonnelier

Diplômé de l'Institut d'Urbanisme de Grenoble en Urbanisme et Projet Urbain, de l'Université de Poitiers et de Moncton (Canada) en Géographie et Sciences Politiques.

5 Commentaires

  • 27 septembre 2010 à 23:11
    Kevin D

    Le greenwashing : lave le cerveau plus blanc que blanc…

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  • 27 septembre 2010 à 23:43

    Excellent, en lisant cet article, je me disais qu’un petit concours de greenwashing sauvage pourrait être sympa, mais le gagnant semble déjà désigné !

    Plus qu’une triste hypocrisie ou qu’une manière d’acheter une bonne conscience (écologique), le greenwashing fait désormais partie des ces préalables indispensables à la construction urbaine. Une tendance de fond dangereuse car n’apportant finalement aucun sens aux projets de ville.

    Planter un arbre en ville, ce n’est pas y apporter la nature. Et encore moins de la qualité de vie.

    (Conviction personnelle, je suis sûr que bientôt on vendras des dynamos pour vélo 3 fois plus cher en les renommant « éco-dispositif de récupération dynamique de l’énergie mécanique naturelle du corps »)

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    • 28 septembre 2010 à 11:46
      Monsieur B

      Il faut souligner tout de même que le futur aéroport de Nantes devrait être un exemple d’intégration à son environnement et ce, au delà de la couleur! Enfin, c’est ce que promettent Vinci et l’Etat!

      Mais le vert ne doit effectivement pas faire oublier le cout carbone de l’opération/ Le vert, nouvelle couleur du mensonge!

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  • 5 mai 2012 à 19:00
    Rom

    Le green washing pour les aéroports s’appuie beaucoup sur l’investissement, pas du tout sur le fonctionnement : 40 à 50 000 atterrisages et décollages par an pour que l’on sente plus le kérosène que l’air des champs, un parking géant de 7500 places (beaucoup de bonnes recettes pour le concessionnaire) alors qu’il avait été juré que le train ou le tram depuis Nantes fonctionnerait le jour de l’inauguration ! Pour atteindre l’aéroport, il faudra plus de km en voiture qu’actuellement !

    Pendant ce temps, il n’y a pas d’argent pour rendre plus rapide le réseau ferré, qui permet de diviser par 10 le CO² et qui permettrait de supprimer des liaisons aériennes, comme Nantes Bordeaux.

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