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Retour sur le colloque « Villes et gares numériques »

Le jeudi 11 avril dernier se tenait, à la Maison de la Chimie (Paris), le colloque « Villes et gares numériques » organisé par Rachel Picard et son équipe de Gares & Connexions. Comme l’intitulé l’indique, ce colloque s’est intéressé à la place du numérique dans nos gares et dans nos déplacements. Voici un petit condensé des échanges de la journées :

Table ronde (Crédits : M. Lee-Vignaud - SNCF/AREP)

Table ronde. Crédits photo : M. Lee-Vignaud / SNCF / AREP

La gare et le numérique

La gare a un rôle majeur à jouer dans l’aménagement et la connectivité des territoires pour de nombreuses raisons.

Tout d’abord parce qu’elle est un élément d’une importance majeure dans la Ville, ayant une valeur patrimoniale, architecturale, identitaire, symbolique, sentimentale… D’ailleurs les usagers utilisent facilement le terme « ma » gare pour invoquer l’endroit où ils prennent le train.

Ensuite parce que les gares et leurs quartiers deviennent de véritable pôles d’échanges et il est nécessaire de faire entrer la ville dans la gare et la gare dans la ville, leur centralité dans le système urbain s’affirme avec l’augmentation des voyageurs. L’organisation entre l’avant et l’arrière des gares doit être particulièrement surveillée et la coupure urbaine que créent les voies ferrées doit être traitée pour connecter toute la ville. Ces espaces sont souvent composés de grandes friches à réhabiliter ou à revaloriser, en évitant la mono-fonction, et surtout en couplant projets urbains et projets de transport qui amélioreront le quotidien des usagers des transports et des quartiers de gares.

Les changements d’utilisation des transports et de comportement des usagers avec le numérique ne doit pas se faire au détriment des territoires moins connectés, en particulier les petites gares et les pôles d’échanges secondaires. Pour cela, ces derniers doivent avoir des fonctions multiples afin d’optimiser et de valoriser les infrastructures dans le but de maintenir de l’activité et de la vie dans ces espaces. Jean-Luc Rigaut, Maire d’Annecy, explique que pour réduire la fracture numérique entre les territoires, des solidarités financières dans les intercommunalités doivent être créées car une agglomération ne peut être forte si son arrière-pays ne l’est pas.

Jérôme Grange, Directeur de l’Agence de Développement et d’Urbanisme du Grand Amiénois (ADUGA), souligne le léger malaise des urbanistes avec le numérique car il crée des extra-territorialités et apporte un modèle économique qui bouleversent la compréhension habituelle de l’urbain. Pour lui, la gare doit retrouver sa raison d’être fondamentale et devenir un lieu basé sur la spécialisation professionnelle (échanges, connaissances, activités marchandes). Le numérique, par le biais du commerce en ligne, pourrait amener à la fermeture de 15 millions de m² de surfaces commerciales d’ici 2020, soit autant d’espaces à réaménager.

Hicham Affane (conseiller régional IdF, administrateur du STIF et président de l’EPF IdF) souligne le besoin de densité autour des gares afin de rentabiliser l’équipement numérique. Dans cette voie, RFF donne la possibilité de s’appuyer sur son infrastructures pour développer la fibre optique (moyennant finances), que l’entreprise installe elle-même pour son aiguillage.

La question de la gouvernance, et en particulier du « qui paie et qui décide ? », a été largement abordée mais elle a largement oubliée le numérique. Rachel Picard souhaite que les usagers, et pas seulement les représentants d’associations de voyageurs ou autres, participent à la gouvernance grâce aux outils numériques.

Capture d’écran du site de Gare 360, gare de Avignon TGV

L’usager et le numérique

Aujourd’hui, on note 4 types de ruptures numériques:

  • générationnelle : les plus de 55 ans sont très peu connectés.
  • sociale : le prix d’un ordinateur ou d’un smartphone reste trop élevé pour une partie de la population.
  • géographique : la couverture des territoires en haut-débit est inégale (pourtant la connectivité entre population urbaine et rurale montre peu d’écart).
  • culturelle : +/- 10% de la population ne sait pas ou a des difficultés pour lire.

Le numérique fait désormais partie des pratiques courantes des usagers qui, grâce aux smartphones ou tablettes, peuvent s’informer sur leur trajet et informer les autres sur les facilités ou difficultés de déplacements. Guillaume Pépy avance le chiffre de 2,5 millions de téléchargements pour l’application SNCF Direct, montrant l’importance du numérique dans les déplacements quotidiens. Il souligne même l’enthousiasme des usagers pour aider à la création d’application, comme Instagare (pour partager ses photos de gare) ou Tranquillien (qui vous aide à monter dans le wagon le moins rempli).

La SNCF veut aider les passagers dans leur déplacements de porte à porte en proposant un service indiquant les correspondances, les heures de départ ou autres, évitant ainsi l’anxiété et le stress dues au trajet. Gare 360 permet aux voyageurs de visualiser leur trajet à l’intérieur de la gare (avec une potion pour les PMR) afin de ne pas se perdre ou de chercher trop longtemps les services en gare.

Le partenariat de la SNCF avec Total et Orange permet de proposer pour certaines gares un service de location de véhicule propres pour les entreprises, facilitant notamment le trajet gare-travail qui est souvent l’obstacle incitant les usagers à préférer le véhicule personnel car le lieu de travail ne se trouve pas à proximité immédiate de la gare.

Néanmoins, le numérique ne doit pas déshumaniser les transports car une part de la population n’est pas, et ne sera surement jamais, connectée.

Le numérique peut permettre de passer d’un temps subit à un temps choisi et utile car il donne la possibilité de faire autre chose pendant le voyage qui n’est pas possible en voiture.

La gare SNCF doit également sortir de son « territoire » pour faciliter la multimodalité et faire entrer les autres réseaux de transports chez elle. Les indications de lieux et d’horaires dans les stations de métro, de tram, de bus, dans les gares routières doivent être mutualisés pour permettre un affichage complet dans chacun de ces lieux pour faciliter les trajets. La difficulté réside dans le fait que chaque opérateur a son propre système informatique et que ceux-ci ne sont pas tous au même niveau de performance.

Dans l’Oise, les 13 Autorités Organisatrices des Transports se sont fédérées, afin de proposer un service continu dans tous le département pour les usagers des transports collectifs, au sein de Oise Mobilité. Tous les objets roulants sont géolocalisés, ce qui permet une information plus précise et plus complète pour les usagers.

Le numérique pour les voyageurs se concentrent également sur le commerce et la possibilité de retirer ses achats en gare pour rentabiliser le temps de trajet ou de proposer des services marchands en gare afin de s’occuper en attendant le train. Si l’exemple de la gare Saint-Lazare montre un succès évident du commerce en gare, mais les intervenants précisent que 50% du commerce en gare en France s’effectue dans seulement 15 gares sur les 3000 du réseau.

L’application « SNCF Direct » sur smartphone

En conclusion, il fallait retenir que le numérique fait partie de l’avenir du transport (ferroviaire et multimodal), que son développement sera fait pour et par les usagers, sans toutefois remplacer la présence humaine dans les gares.

Catégorie:France, Transports
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L'auteur
Pierre Tardy

Rédacteur pour Urbanews.fr & chargé de mission à la MEL. Diplômé de l'Institut d'Aménagement et d'Urbanisme de Lille (IAUL).

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